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Quintus Septimius Florens Tertullianus

La présentation suivante ne se veut pas

exhaustive mais originale ; elle voudrait

donner le goût et stimuler l'intérêt

de l'étude personnelle. Elle tient compte

des recherches historico-critiques récentes

s'agissant des œuvres esquissées. Il est

bien à propos pour quiconque veut

travailler attentivement une œuvre qui

le nourrisse, de se procurer soi-même

le volume correspondant dans l'excellente

Collection Sources chrétiennes.


Avec Tertullien, nous avons l'exemple type

pour préciser un point très important,

s'agissant du témoignage des Pères de l'Eglise :

Dans leurs écrits, tout n'est pas à prendre pour

argent comptant. Leur théologie représente

certes, un élément majeur du patrimoine global

de la Tradition, mais il n'est pas exclu que tel ou tel

ait pu à un moment de sa vie, déraper dans son

rapport à la foi commune de l'Eglise ;

il convient donc de ne prendre dans ses œuvres,

que ce qui explicite la foi ratifiée par les différents

Conciles. En l'exprimant autrement, il ne suffit

pas que tel ou tel soit un Père de l'Eglise pour que

son témoignage doctrinal s'impose forcément

comme étant immédiatement l'expression

de la foi de l'Eglise.


Cette présentation est nécessairement

partielle et succincte. Rien ne sera jamais

mieux que de se donner les moyens de

travailler les œuvres elles-mêmes.


Au IIIème siècle, les chrétiens d'Afrique ont donné

à l'Eglise latine la plupart de ses écrivains.

Tertullien naît à Carthage (Tunis) entre 150 et 160,

d'une famille païenne. Sa conversion intervient

vers 195. Il mettra au service de l'Eglise tout son

talent et sa culture qui furent remarqués et salués

par Saint Jérôme au IVème siècle. L'apport de son

travail est principalement catéchétique

et apologétique. Nous présenterons ici son

magnifique Traité du Baptême, vraisemblablement

rédigé entre 200 et 206, ainsi que

son Traité d'Apologétique, daté de 197.


Lutteur et volontaire, cet homme de Dieu a fini

par devenir excessif et surtout intransigeant !

A l'instar de Saint Jérôme mais néanmoins

différemment, son caractère était impossible...

L'art de la mesure ne fut pas sa qualité

première, et il ne tarda donc pas à glisser

vers une secte récemment introduite en Afrique :

le Montanisme. Lui qui avait parlé de l'Eglise

comme d'une mère dans et pour la foi, finit par

retourner tout son génie contre elle, estimant

qu'elle n'était pas assez rigoureuse et exigeante..

Nous sommes vers 213. Peu satisfait par les

Montanistes, Tertullien finit par créer la secte

des tertullianistes ! Plus positivement, entre

197 et 206, nous conservons plus de 20 Traités

apologétiques de ce grand témoin de la foi des

premiers siècles... Saint Jérôme saluera dans sa

Chronique, Tertullien l'Africain, comme le fils

du centurion de Carthage dont les paroles

sont citées par toutes les Eglises...



Le Traité du Baptême

De Baptismo

Le Traité d'Apologétique

Apologéticum


Le Traité du Baptême

De Baptismo



Un des premiers témoignages de doctrine

et de spiritualité baptismales majeur !


L'occasion du Traité du Baptême : parmi les

nombreuses sectes de l'époque, une

particulièrement, rejetait le baptême chrétien.

L'intention catéchétique de Tertullien

motiva ce Traité ! Sur les 20 chapitres, ce

sont les 10 derniers qu'il faut travailler surtout,

afin de goûter le meilleur de la doctrine

chrétienne... Les 10 premiers constituent une

polémique à l'adresse de la secte des canaïnites...

Nous trouvons le texte original dans l'un

des premiers numéros de la Collection

Sources chrétiennes, le 35.


Quelques citations :


"C'est le sacrement de l'eau

cette eau qui lave nos péchés

au temps de notre cécité originelle,

cette eau qui nous enfante

à la liberté de la vie éternelle." (1)


"Nous, petits poissons (pisciculus en latin

au singulier et pisciculi au pluriel)

qui tenons notre vie de notre Ichtus

(poisson en grec au singulier),

nous naissons dans l'eau

et demeurons en elle pour être sauvés..." (1)


NOTA BENE 1 : ΙΧΘΥΣ (ichthus) est un acronyme

de Ἰησοῦς Χριστός, Θεοῦ Υἱός , Σωτήρ :

Jésus Christ, Fils de Dieu, Sauveur.

IXTUS = notre poisson en grec, le Christ,

(qui nous guide dans les eaux salutaires),

tandis que nous sommes les pisciculi

(les petits poissons) de ces eaux bienfaisantes....


NOTA BENE 2 : Dans l'ancienne nécropole

gallo-romaine de Saint-Pierre l'Estrier

à Autun, en Saône et Loire,

fut découvert au XIXème, un très ancien graffiti

que l'on nomme l'inscription de Pectorios,

datée du IVème siècle.

En rapport avec le Baptême et l'Eucharistie,

cette inscription nous livre ce poème :


"Ô race divine du Poisson céleste,

Garde une âme pure parmi les mortels

Parce que tu as reçu la source immortelle,

Rajeunis ton âme, ami, dans les eaux divines,

Par les flots éternels de la sagesse

qui donne les trésors.

Reçois l'aliment doux comme le miel

du Sauveur des Saints,

Mange à ta faim, bois à ta soif,

Tu tiens le Poisson dans les paumes de tes mains.

Nourris-nous donc, Maître et Sauveur,

avec le Poisson.

Qu'elle repose en paix, ma mère

Ainsi je te prie, (toi) Lumière des morts.

Aschandius, mon père, aimé de mon cœur,

Avec ma douce mère et mes frères,

Dans la paix du Poisson,

souvenez-vous de votre Pectorios."


On trouve actuellement ce très petit

vestige chrétien au Musée Rolin d'Autun.


Dans le saint baptême :

simplicité des moyens et grandeurs

des effets ! (Voir 2)


"Quelle figure plus manifeste du sacrement

de baptême ? Les nations sont délivrées de

l'esclave du siècle ; et le démon, cet ancien tyran,

perd son orgueilleux pouvoir dans les eaux...

L'eau, d'amère qu'elle était, redevient douce

dès que Moïse la touche avec le bois.

Le bois de cette branche

représentait la croix, à laquelle Jésus-Christ

a été attaché pour guérir, par sa vertu divine,

en des eaux salutaires des eaux autrefois insipides

et empoisonnées : ces eaux salutaires sont

les eaux du baptême figurées par l'eau que Moïse

fit miraculeusement sortir du rocher,

et qui accompagnait le peuple d'Israël.

Or, si cette pierre était Jésus-Christ,

il n'y a pas de doute que les eaux

du baptême sont bénies en Jésus-Christ..." (9)


"Il invite ceux qui ont soif à venir se désaltérer

à cette eau éternelle (...) . Il affirme qu'un verre

d'eau donné au pauvre est une œuvre de charité

(...) Il répare ses forces aux eaux du puits de Jacob ;

il marche sur les eaux ; il passe et repasse le lac

de Génézareth, il lave lui-même les pieds

de ses disciples. Enfin les témoignages en faveur

du baptême se continuent jusqu'à la Passion.

Le Sauveur ne sera pas condamné à la croix

sans que l'eau intervienne ; c'est pour les

mains de Pilate. Lorsqu'il est blessé, c'est encore

de l'eau qui jaillit de son côté

par la lance du soldat." (9)


Le baptême du sang, le martyre,

"Voilà quel est le baptême qui supplée

le baptême d'eau quand nous ne l'avons

pas reçu, et qui nous le rend quand

nous l'avons perdu..." (16)


"Ceux dont c'est l'office d'administrer

le baptême n'ignorent pas qu'il ne faut point

le conférer sans de grandes précautions (...)

Il convient de se souvenir de ces paroles :

"Ne donnez point aux chiens ce qui est saint,

et ne jetez point vos perles aux pourceaux..." (18)


"Le jour solennel du baptême est le jour

de Pâques, lorsque le temps de la Passion

de notre Seigneur, dans laquelle

nous sommes baptisés, est accompli." (19)


"Vous, les bénis, vous que la grâce de Dieu attend,

vous qui remontez du bain très saint de la

nouvelle naissance, vous qui allez tendre

vos mains pour la première fois à une mère,

avec des frères ! Demandez au Père, demandez

au Seigneur des biens sacrés, et l'abondance

de ses charismes ! (...) En effet, vous avez cherché

et vous avez trouvé, vous avez frappé

et l'on vous a ouvert !" (Exhortation finale)



Le Traité d'Apologétique

Apologéticum



L'apologétique est l'art de défendre la foi et de

l'argumenter. Tertullien s'adresse à un magistrat

et lui expose au nom du droit, que les mesures

prises à l'encontre les chrétiens sont illégitimes

et injustes... En effet, un édit impérial porté sous

Néron et renouvelé plusieurs fois au cours des

premiers siècles, défendait sous peine de mort,

d'être chrétien : "Non licet vos", "non licet

esse christianum" : "Il n'est pas permis d'être

ce que vous êtes", "il n'est pas permis d'être

chrétien !" Cette loi pouvait éventuellement

être assouplie, si le législateur pressentait

que le chrétien était enfin disposé à renier sa foi...

Quelle était donc la motivation de Tertullien ?

Se faire entendre puisque les juges

refusaient d'écouter la défense des chrétiens,

mis en cause et accusés de tous les maux...

C'était le simple "Nom" de chrétien

qui était l'objet de la haine païenne...

Nous sommes en 197.

On trouvera ce Traité audacieux et ancien,

dans l'édition les Belles Lettres, publié pour

la première fois dans cette Collection, en 1929 ou sur la toile, dans une traduction

élaborée par J.-P. WALTZING.

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